The brutalist : une architecture de l'exil et de la desillusion

 

Hier, je me suis aventurée au cinéma sans trop savoir où je mettais les pieds. J’ai vu The Brutalist, un film que j’ai choisi avant tout pour Adrien Brody, un acteur dont j’apprécie particulièrement le jeu. En lisant le titre, j’imaginais un film violent, une descente aux enfers où un homme perdrait peu à peu son humanité. J’étais loin du compte.

Ce que j’ai découvert, c’est un film sur le revers du rêve américain, sur le parcours de ces hommes et femmes juifs après la Seconde Guerre mondiale. On commente souvent ce qu’il s’est passé pendant la guerre, mais on évoque bien moins l’après. Que sont devenues ces personnes déracinées, exilées, qui ont tout perdu et qui ont dû se reconstruire ailleurs ? The Brutalist s’attarde sur cette question à travers la trajectoire de son personnage principal, un architecte hongrois cherchant à bâtir quelque chose de grand aux États-Unis.

J’ai été fascinée par le bâtiment qu’il conçoit, une œuvre d’art brut, imposante et saisissante. L’architecture y devient un langage, une expression de soi dans un monde qui ne laisse que peu d’espace à la singularité. Chaque plan du film est travaillé avec une précision qui m’a subjuguée, comme si la mise en scène elle-même répondait à une logique architecturale.

Le film n’a pas hésité à aborder des thèmes durs avec une sincérité brute. Les scènes de sexe, par exemple, ne versent jamais dans la vulgarité, elles sont filmées avec une certaine pudeur et une justesse qui les rendent crédibles et intenses. À l’inverse, la scène de viol m’a profondément marquée par sa brutalité, contrastant violemment avec le reste du film. Cette violence n’est pas gratuite, elle sert un propos : montrer la cruauté d’un monde où les puissants, médiocres et sans scrupules, abusent de ceux qui tentent seulement de s’élever.

J’ai néanmoins été un peu déçue par certains clichés disséminés dans le film : le bon copain noir, bienveillant et loyal, et l’Italien qui danse, presque caricatural. Ces stéréotypes m’ont semblé un peu faciles dans un film qui, pourtant, cherche à aller au-delà des apparences et des conventions.

Un autre choix narratif m’a, en revanche, particulièrement plu : le passé du personnage principal reste une énigme jusqu’à la toute fin. Ce silence sur son histoire crée une tension discrète tout au long du film, nous laissant deviner, supposer, avant que la révélation finale ne vienne donner une nouvelle dimension à l’ensemble. Cette manière de construire le récit m’a tenue en haleine et a renforcé l’impact émotionnel du film.

En sortant du cinéma, j’étais partagée entre plusieurs sentiments : la fascination pour l’esthétique du film, la réflexion sur le destin des exilés après la guerre, et une certaine amertume face aux compromis imposés par un monde corrompu. The Brutalist n’est pas un film parfait, mais il est beau, puissant, et m'a laissé une empreinte durable.

Les éléments techniques du film :

• Titre original et francophone : The Brutalist
• Réalisation : Brady Corbet
• Scénario : Brady Corbet et Mona Fastvold
• Musique : Daniel Blumberg
• Pays d'origine : États-Unis, Hongrie, Royaume-Uni
• Langues originales : anglais, hongrois
• Format : couleur, 1.66:1
• Durée : 214 minutes (3h34)
• Dates de sortie :
  • Première mondiale : 1er septembre 2024 (Mostra de Venise)
  • États-Unis : 20 décembre 2024
  • Hongrie : 23 janvier 2025
  • Royaume-Uni : 24 janvier 2025

Le film a été tourné en utilisant le procédé VistaVision, un format grand écran qui fait passer la pellicule 35 mm horizontalement dans la caméra pour créer des images de haute qualité.

Le film a été présenté en deux actes avec un entracte de 15 minutes, suivi d'un épilogue.