" On avait d'abord cru y voir un sacrifice ... En perdant la plus grande partie de nos objets de consommation, on se sentit moins libres ... Moins libres de consommer ... Mais comme de toute façon ces choses n'existaient plus, on se rendit compte assez vite qu'elles ne nous manquaient pas ... et que de liberté en réalité, il n'avait jamais été question ... Seulement d'une éternelle incomplétude. Un vide toujours plus grand et abrutissant. Ce manque abyssal était au ceour même de l'ancien système qui avait précipité notre monde dans le chaos duquel nous étions nés." Epiphania, tome 3 de Debeurme
Réécriture :
On avait d’abord cru y voir un sacrifice.
En perdant la plus grande partie de nos objets de consommation, nous avons cru perdre une liberté.
Pas seulement celle de consommer, mais celle de choisir, de nous distinguer, de nous projeter.
Certaines de ces choses nous ont réellement manqué.
D’autres avaient structuré nos journées, nos relations, parfois même notre sentiment d’utilité.
Mais peu à peu, nous avons compris que ce n’était pas tant les objets qui faisaient défaut que la promesse qu’ils portaient.
Une promesse de complétude sans cesse repoussée.
L’ancien système ne reposait pas uniquement sur l’abrutissement ou la contrainte.
Il produisait aussi du confort, du savoir, des liens, des technologies capables d’élargir notre compréhension du monde.
C’est précisément pour cela qu’il était si difficile à quitter.
Ce qu’il organisait, au cœur même de ses réussites, c’était un manque structurel, discret, persistant, présenté comme une condition de la liberté.
Ce manque structurel en question ?
C'est un état de non suffisance maintenu, ni trop grand, ni trop menu pour qu'il se poursuive, dans lequel chaque individu est tenu. Un manque qui a été organisé socialement, crée de toute pièce alors même que nous venions en combler un. Ironique non ?
Comment ?
Par une promesse toujours différée (si j'avais, ...) puis par une obsolescence programmée ; non pas que notre appareil ne marche plus mais la croyance est posée, que cet outil n'est plus à la hauteur, qu'il ne nous correspond plus, ...et enfin la comparaison permanente avec un ou une mise en avant. La touche finale : on multiplie les offres pour qu'on est cette impression de liberté de choix sauf que cette multiplicité nous retire une prise réel sur le sens.
Pourquoi est-il efficace ?
Parce qu'il est intériorisé.
La technologie dans tout ça :
Elle peut à la fois générer sur celui qui subit le manque : une agitation, un sentiment de ne jamais y arriver, une fatigue existenciel, une difficulté à habiter le présent et se concentrer. Cependant, elle peut aussi révéler les mécanismes, donner accès au savoir, rendre visible les limites du système, permettre de nouvelles ou pas formes de créations. Ce n'est pas un mal non mais un amplificateur.








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